Dreux un Avenir en Commun

Dreux un Avenir en Commun

La ville de Dreux pavoisée par la multinationale Kaufman et Broad

Tout le monde a remarqué ces derniers jours à Dreux les petits ballons bleus accompagnés d'un petit flyer publicitaire qui sont accrochés aux aménagements anti stationnement le long de rue du centre ville de Dreux. Cela attire la curiosité des passants. On se dit "Est-ce pour indiquer une fête d'anniversaire ?" la première fois... Puis en regardant de plus près on s'aperçoit qu'il y en a partout, des dizaines, voire plus d'une centaine... Ce sont des objets publicitaires qu'une entreprise privée a eu l'autorisation de placer dans la ville. Et là on se dit que la vie est belle pour les actionnaires surtout au regard de la pénurie d'affichages publics réservés aux citoyens simples pour informer sur les événements à Dreux.

 

Car en effet à Dreux règne la loi du marché ! L'entreprise Kaufman et Broad va construire une résidence dans le parc des Bâtes. Gérard Hamel a donné son accord en juin 2017 pour que cette société achète et construise une résidence de 120 logements dans un des derniers lieux naturels de Dreux. Des Drouais et des associations écologistes dont la présidente de l'association AVERN avaient à l'époque protesté et obtenu du Maire qu'une commission se tienne pour débattre de ce projet. En effet ce lieu est un des derniers de la ville à constituer une réserve de biodiversité à l'état naturel sans aménagement urbanistique, ouvert. L'adjoint à l'urbanisme de la ville de Dreux avait donné son sentiment vis-àvis de la biodiversité en qualifiant ce lieu de "friche". Une "friche" pour l'élu c'est un terrain qui ne sert à rien, qui ne rapporte rien, qui n'a aucune utilité... Et aucune commission n'a vu le jour. Comme pour tout ce qui se décide à Dreux, la consultation ou la participation des citoyens n'est pas requise ou souhaitable. les décisions se prennent dans le cercle très restreint du Maire et de son entourage proche.

 

Ils bétonneront tout ! Tous les lieux, prairies et lieux naturels, il ne restera aucune mètre carré de terre nue à Dreux. Après la prairie du boulevard Jean Jaurès où une résidence est en construction et où déjà une résidence avait été construite maintenant c'est le tour du parc des Bâtes... Le remplacement des friches industrielles démolies ne suffit plus, les espaces libres seront tous exploités, bétonnés et aménagés avec l'assentiment voire le zèle de la mairie de Dreux.

Ces derniers temps, Dreux a connu des inondations importantes. L'une des principales cause de ces inondations est le manque de possibilité pour les eaux de pluie et de ruissellement de s'évacuer, en cause le bétonnage et l'asphalte qui recouvrent toutes les terres... (cf. le lien inondation du site gouvernemental ci-dessous)

L'urbanisation à outrance n'est plus une option aujourd'hui où les enjeux écologiques et climatiques font sentir leur urgence. Mais dans la "Start Up Dreux", on ne se soucie guère de ces problèmes. On bétonne, on verra ensuite les conséquences...

 

Revenons au pavoisement de la ville par Kaufman et Broad. Cette entreprise qui communique beaucoup en particulier sur internet a conservé son apparence de promotrice immobilière "haut de gamme" et elle joue sur ce registre à Dreux dans sa démarche commerciale drouaise tout en mettant en avant des opportunités de remises allant jusqu'à 15 000€ sur l'achat d'une maison individuelle. S'agit-il en fait d'un effet de la politique de la ville dont bénéficie cette entreprise ? En effet, les constructions situées à moins de 300 mètres d'un quartier ciblé par un projet ANRU peuvent bénéficier d'une TVA à 5,5% au lieu de 20% dans les autres cas. Cela représente un allègement conséquent du prix de la construction. L'entreprise Kaufman et Broad est contrainte du point de vue légal de mentionner la nature de cet avantage fiscal mais elle le fait d'une façon qui peut facilement porter à confusion entre l'accroche publicitaire, le geste commercial et la nécessité d'informer les consommateurs. C'est parce que cet allègement de TVA est conditionné par un plafond de ressources des acquéreurs du bien construit. 

Dans la petite agence Kaufman et Broad qui s'est installée face au marché couvert, on se garde bien d'afficher une large géolocalisation du site de la future nouvelle résidence baptisée "Le Clos des Ducs" incluant le quartier des Bâtes qui permet aux acquéreurs de bénéficier de la baisse de la TVA. Et il faut chercher tout en bas de la plaquette publicitaire, en tout petits caractères, la source de cet avantage fiscal...

 

 

 Mentions légales largement agrandies...

Cette mesure est déstinée à permettre l'acquisition de biens immobiliers à des acquéreurs avec des revenus sous un plafond de ressources c'est-à-dire moins élevés. C'est pourquoi Kaufman et Broad met en avant "dans la limite des stocks disponibles" ce qui tendrait à induire que toutes les maisons de la résidence ne bénéficieraient pas de cet abattement... Or ce n'est pas le cas puisque c'est la localisation de cette résidence qui conditionne cette mesure.

 

On peut se dire que cette opération aura le mérite d'installer une mixité sociale dans le quartier des Bâtes entre ceux qui accèderont à la propriété grâce à la diminution de la TVA et ceux qui y accèderont avec des conditions moins avantageuses car soumises au plafond de ressources. 

 

Cependant, tout comme le quartier des Bâtes n'apparait pas sur le plan proposé par Kaufman et Broad, la résidence qui va être construite ne sera pas complètement intégrée au quartier environnant. Ce sera une résidence privée et clôturée, disposant d'une rue et d'une entrée unique avec un portail automatique sécurisé qui ne permettra pas l'accès aux autres habitants du quartier à la résidence. Ce sera une résidence privatisée. La rue sera le domaine exclusif des habitants de la résidence.

 

C'est une nouvelle façon de penser la ville. Puisque les politiques publiques ne parviennent pas à redynamiser économiquement les quartiers populaires, on s'isole de ces quartiers derrière des clôtures et des dispositifs de sécurité. Il n'est pas certain que la mixité sociale joue à plein dans ces conditions. 

 

Sur le fait que ce soit l'entreprise côtée au CAC40 depuis 2000 qui est détenu majoritairement (79%) désormais par un puissant fonds allemand PAI Partners dont le chiffre d'affaires s'élevait à 1,3 Md d'€ en 2017 n'est pas nécessairement un gage de gain économique pour le Drouais et de garantie de sérieux pour les consommateurs acquéreurs.

 

En effet, dans un article du 31 janvier 2018 de la revue économique "Le Moniteur", un représentant de Kaufman et Broad explique que leur politique s'est tournée depuis 2008 vers des programmes qui bénéficient des conditions avantageuses de l'ANRU. Il précise que les trois leviers qui permettent à l'entreprise de consolider ses marges (Kaufman et Board envisage une croissance de 8 à 10% en 2018) ce sont trois leviers : la négociation des prix des terrains qu'ils cherchent à acheter le moins cher possible, la négociation de meilleurs prix auprès des entreprises de construction qui cherchent à garnir leur carnet de commandes et la réduction des surfaces des habitations construites. Selon cet interlocuteur de Kaufman et Broad en conclusion, "Il est urgent de pousser les maires à libérer du foncier constructible, que les pouvoirs publics donnent l'exemple et arrêtent enfin de vendre les terrains au plus offrant, et de faire une pause sur les normes."

 

Ainsi donc, alors que le PDG de Kaufman et Broad Nordine Hachémi expose dans les médias son argument principal comme étant la création d'emplois partout où il construit, les économistes rendent compte de la stratégie de cette entreprise comme cherchant à tirer le plus possible les prix pour sauvegarder des marges importantes et donc les rémunérations des actionnaires. Quelles sont ainsi les variables d'ajustement de cette politique entreprenariale de Kaufman et Broad pour les sous-traitants ? Les coûts et donc la qualité des matériaux utilisés et les coûts salariaux et par conséquent l'emploi. Il existe donc une réelle contradiction à favoriser un promoteur immobilier aux stratégies économiques agressives sur le marché de l'immobilier, créant du dumping économique pour sauvegarder ses marges et la volonté de revitaliser économiquement une ville déjà lourdement touchée par le chômage. 

 

Au niveau des consommateurs, on note sur les réseaux sociaux des témoignages de consommateurs qui déplorent qu'il est très difficile d'avoir gain de cause en cas de malfaçons face à une très grande entreprise promoteur immobilier. Cela semble arriver apparemment aussi avec Kaufman et Broad malgré son image de marketing.

 

Le choix de cette entreprise "compétitive" au niveau des coûts qu'elle peut proposer ne représentera sans doute pas un atout pour l'économie de Dreux. Apparemment il semblerait qu'il n'y ait plus de temps à perdre pour Kaufman et Broad si l'on en croit le calendrier publié par l'ANRU pour bénéficier de la TVA à 5,5%... Cela a peut-être été le moteur de cette décision rapide de finaliser le projet sans concertation avec les écologistes de Dreux ?

 

document source ANRU

 

En résumé, le dernier site naturel de Dreux du parc des Bâtes, l'un des derniers à conserver une faune et une flore sauvages, et un terrain non bétonné et non aménagé contribuant au niveau écologique à absorber le ruissellement des eaux de pluies et donc à limiter les inondations, est vendu à un promoteur immobilier, une entreprise multinationale dont l'objectif premier est de pratiquer des marges les plus importantes possibles pour satisfaire son actionnariat mondialisé, pour construire une résidence clôturée et sécurisée dont la rue principale ne sera pas accessible à l'ensemble des citoyens de Dreux. 

 

Est-ce la politique de la ville que nous souhaitons pour Dreux ?

 

Inondation le site du gouvernement pour comprendre les phénomènes

Article Le Moniteur du 31 janvier 2018



26/06/2018
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